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Etude des peuplements piscicoles de la retenue du barrage de Sidi Salem
S. MILI1,2*
R. ENNOURI2
H. LAOUAR3
N. BEN ROMDHANE4
H. MISSAOUI2
1Unité de recherche : Exploitation des milieux aquatiques, Institut Supérieur de Pêche et d’Aquaculture de Bizerte, BP 15, 7080 Menzel Jemil, Tunisie.
2Institut National des Sciences et Technologies de la Mer, 28, rue 2 mars 1934 Salammbô, 2025, Tunis, Tunisie.
3Centre Technique d’Aquaculture, 5, rue du Sahel Montfleury, 1009 Tunis, Tunisie.
4Direction Générale de la Pêche et de l’Aquaculture, 30, Rue Alain Savary, 1002, Tunisie
Abstract - The study of fish populations in reservoirs is essential for sustainable management of the freshwater fisheries. The sampling technique used was based on the European standard CEN prEN 14757. This technique (multi-mesh gillnets) was adapted to Tunisian dams. A stratified random sampling was implemented according to the depth and area of the dam. Samplings were conducted in Sidi Salem reservoir between April and May 2014. The fish communities were composed by 7 species: roach, rudd, carp, pike-perch, phoxinel and two species of mullet (Liza ramada and Mugil cephalus). The weight and numeric yield was average (114 ind / 1000m² and 8.08Kg / 1000m2). The majority of catches were obtained at depths less than 12m. Populations of Mullet and carp show a strong deficit indicating a state of over-exploitation and insufficiency of stocking. Sidi Salem reservoir has a well balanced and abundant population of roach, rudd and pike-perch. However, this dam presents a remarkable deficiency of autochthon fish. Diversity indices indicate a little diversity in this dam. Additionally, we identified that the stock of mullet was declining and of eels was lack in this survey. This reservoir required a support from fisheries managers.
Keywords: Sampling, fish populations, Sidi Salem reservoir, multi-mesh gillnets.
Résumé - La gestion durable de la ressource ichtyque dans les retenues de barrages est basée sur l’étude des peuplements piscicoles qui y sont présents. La technique d’échantillonnage est inspirée de la norme européenne CEN prEN 14757. Cette méthodologie a été adoptée aux barrages tunisiens. Un échantillonnage stratifié aléatoire a été mis en œuvre selon la profondeur et la superficie du barrage de Sidi Salem. Cette retenue a été prospectée entre le mois d’avril et le mois de mai 2014. Les peuplements piscicoles inventoriés sont composés de 7 espèces : le gardon, le rotengle, la carpe commune, la phoxinelle de la calle, le sandre et les deux espèces de mulet (Mugil cephalus et Liza ramada). Les rendements enregistrés sont moyens sur le plan pondéral et numérique (8,08Kg /1000m2 et 114 ind/1000m²). La majorité des captures a été obtenue à des profondeurs inférieures à 12m. Le mulet et la carpe montrent un fort déficit indiquant un état de surexploitation et une insuffisance de l’ensemencement. La retenue de Sidi Salem abrite des populations de gardon, de rotengle et de sandre bien abondantes et équilibrées. Cependant, ce barrage présente une carence remarquable en poissons autochtones. Les indices de diversité indiquent que les peuplements étudiés sont peu diversifiés au niveau du barrage de Sidi Salem. De plus, nous avons décelé un déclin du stock du mulet ainsi que l’absence de l’anguille et du silure dans le barrage prospecté. Cette retenue d’eau nécessite une intervention des gestionnaires de la pêche.
Mots clés: Echantillonnage, peuplements piscicoles, barrage Sidi Salem, filets multi-mailles.
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Introduction
La Tunisie s’est investie dans la pisciculture continentale depuis les années 60. Cette activité a été initiée à travers l'alevinage de certaines retenues de barrage par les alevins de Mugilidae et leur exploitation par la pêche. Actuellement, 32 retenues de barrages et 12 lacs collinaires sont exploités (DGAP 2014). Ces dernières années, la production piscicole continentale tunisienne a connue une nette croissance. En effet, elle est passée de 843,5 tonnes en 2000 à plus de 1034 tonnes en 2014 (DGPA 2014). Les espèces de poissons pêchés couramment dans les réservoirs tunisiens sont: la carpe (Cyprinus carpio), le sandre (Stizostedion lucioperca), les mulets (Mugil cephalus et Liza ramada), l'anguille (Anguilla anguilla), le silure (Silurus glanis), le gardon (Rutilus rutilus), le barbeau (Barbus callensis) et le tilapia (Oreochromis niloticus). La croissance significative des espèces introduites dans les retenues d’eau, surtout des mulets, associés à l’importante production, montrent à l'évidence que les retenues de barrage tunisiennes représentent un potentiel important qui devient nécessaire à exploiter. Pour ce fait, la compréhension de l’état des peuplements piscicoles est indispensable ce qui permettra la prise des décisions adéquates à la gestion des pêcheries et à l'exploitation durable de ces ressources. Malgré les efforts déployés par les institutions de l’état, la pêche dans les réservoirs tunisiens connait de nombreux problèmes en particulier le manque de statistiques fiables de la production et un plan de gestion efficace pour le développement de cette activité.
C’est dans ce cadre que s’intègre cette étude qui fait partie d’un projet de recherche/développement, réalisé en collaboration entre le Centre Technique d’Aquaculture, l’Institut Supérieur de Pêche et d’Aquaculture de Bizerte et la Direction Générale de la Pêche et de l’Aquaculture et qui se focalise sur l’étude de l’état des peuplements piscicoles dans les retenues de barrages en Tunisie.
La connaissance de la structure et l’état des communautés ichtyques représentent une clé importante pour la gestion des pêches. L'objectif de cette étude est de déterminer la richesse spécifique et la structure des populations dulcicoles ainsi que les rendements de pêche dans le barrage de Sidi Salem afin de proposer un plan de gestion des pêches adéquat à ce réservoir.
Le Centre Technique d'Aquaculture en coopération avec l'Institut Supérieur de la Pêche et de l'Aquaculture de Bizerte ont mis en place une technique d'échantillonnage des poissons dulçaquicoles avec des filets multi-mailles inspirés de la CEN européenne 14757 (CEN 2005). La méthode fournit un ensemble de données relatif à la richesse spécifique et l'abondance quantitative et qualitative des ressources halieutiques exprimées en nombre par unité d'effort et en biomasse par unité d'effort ainsi que la structure en taille des poissons dans les réservoirs. Le protocole d'échantillonnage avec des filets maillants multi-mailles a été appliqué pour la première fois en Tunisie, malgré qu’il est considéré comme étant une méthode standard pour l’évaluation des peuplements de poissons dans les lacs et les réservoirs en Europe (Argillier et al. 2012).
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Matériel et méthodes
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Présentation de la retenue de barrage
Le barrage de Sidi Salem (36°35’26’’N, 9°23’44’’E) est situé à quelques kilomètres vers le nord ouest de la ville de Testour (Figure 1). Cette fondation a été mise en eau en 1981 pour l’alimentation en eau potable du grand Tunis, la région du Sahel et Sfax avec 111 Mm3/an, l’irrigation des périmètres irrigués avec 276.650 Mm3/an et la production de l’énergie électrique avec une puissance nominale de 36 MW. La retenue du barrage couvre une superficie de 5521 ha avec un volume de 814 millions m3 (côte de la retenue normale). La salinité des eaux varie entre 0,891 et 2,409 g/L avec une moyenne de 1,4 g/L (SOUDOUD 2006). Ce barrage est formé par une digue à noyau central vertical en argile et à recharges en matériaux marno-gréseux et argilo-sableux. Il est équipé d'un évacuateur des crues courantes d’un débit maximal de 760 m3/s et d’un évacuateur de surface pour les crues exceptionnelles d'une capacité d'évacuation d'environ 4200 m3 par seconde (SOUDOUD 2006).
Figure 1 : Situation géographique de la retenue de barrage de Sidi Salem |
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Présentation de la technique d’échantillonnage
La technique d’échantillonnage utilisée est inspirée de la norme européenne CEN prEN 14757. Elle est basée sur l’utilisation de deux types de filets multi-mailles : benthiques et pélagiques. Les filets, confectionnés en monofilament invisible, comportent des mailles de 8 dimensions différentes comprises entre 18 mm et 80 mm. Le montage est réalisé selon une série géométrique avec un rapport de 1,25 entre les différentes dimensions de mailles. Les caractéristiques techniques des filets sont détaillées dans le tableau 1. Les filets benthiques présentent une longueur de 20 m et une profondeur de 1,5 m. Chaque alèze, composée de panneaux mesurant 2,5 m de long, est montée sur une ralingue de flotteurs et une ralingue plombée en bas de 20,5 m de long. La ligne de flotteurs du filet pélagique mesure 20 m de long, alors que sa ralingue plombée a une longueur de 20,5 m. Le montage des deux ralingues horizontale est réalisé selon un rapport d'armement de 50%, alors que ce taux est de 71% pour les ralingues verticales. Les filets pélagiques sont subdivisés en 4 parties mesurant chacune 1,5m. Chaque série de panneaux horizontaux sont marqués par une filière qui traverse les 2 nappes de filets superposées pour attacher les mailles de côtés entre elles. Il est à noter que les pièces de filets montées sont associées deux à deux.
Tableau 1 : Caractéristiques techniques des panneaux utilisés pour le montage des filets maillants multi-mailles |
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Mailles N° |
Dimension des mailles (mm) |
Diamètres du fil (mm) |
Nombre de mailles de côté |
Nombres de mailles franches |
1 |
40 |
0,28 |
62 |
26 |
2 |
18 |
0,28 |
138 |
59 |
3 |
55 |
0,28 |
45 |
19 |
4 |
24 |
0,23 |
104 |
44 |
5 |
35 |
0,23 |
71 |
30 |
6 |
70 |
0,28 |
35 |
15 |
7 |
28 |
0,23 |
89 |
38 |
8 |
80 |
0,28 |
31 |
13 |
Un échantillonnage stratifié aléatoire est employé pour tenir compte de la distribution spatiale irrégulière des poissons dans la retenue de barrage (Figure 2).
Figure 2 : Emplacement des filets benthiques et pélagiques au niveau du barrage de Sidi Salem. |
La retenue d’eau est divisée en strates de profondeur de 3 m (0-2,9 m ; 3-5,9 m …). L’emplacement des filets benthiques au niveau des strates et l'angle de mise à l’eau par rapport à la berge sont aléatoires. La pêche dans la retenue de Sidi Salem s’est déroulée entre le mois d’avril et le mois de mai 2014. Les filets sont calés le soir entre 16 h et 18 h pour être relevés le lendemain entre 5h et 7h du matin. Au cours de chaque opération d’échantillonnage la répartition des filets a couvert toutes les couches de profondeur de manière à éviter les biais dus aux différences de conditions spatio-temporelles et météorologiques. La superficie totale des filets benthiques mise en œuvre dans le barrage de Sidi Salem est de 3240 m² (54 pièces). La répartition de ces filets, dans les différentes strates de profondeur, sont détaillés dans le tableau 2.
Tableau 2 : Répartition des filets benthiques au niveau des différentes couches de profondeur. |
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Strate |
0 - 2,9 m |
3 - 5,9 m |
6 - 11,9 m |
12 - 19,9 m |
19 - 34,9 m |
Total |
Nombre de filets |
10 |
10 |
12 |
12 |
10 |
54 |
La superficie totale de filets pélagiques mise en œuvre est de 720 m². Ils sont posés dans les parties les plus profondes du barrage à trois profondeurs différentes (prés de la surface, à 6 m et à 12 m de profondeur).
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Exploitation et analyse des données
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Identification et biométrie des captures
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L’identification des espèces a été réalisée en se référant aux fiches techniques de chaque espèce (Kraiem 1983). Tous les poissons pêchés ont été dénombrés, mesurés et pesés. Les paramètres morpho-métriques suivants ont été prélevés pour chaque poisson : longueur totale (Lt), longueur standard (Lst) en cm et poids total (Pt en g).
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Indices d’abondance
La diversité des peuplements ichtyques dans le barrage de Sidi Salem a été exprimée par la richesse spécifique totale (S) (Blondel 1975). L’indice de diversité de SHANNON (H’) et l’indice d’équirépartition des populations (E) ont été calculés selon les formules de Barbault (1981).
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Analyse Statistique
Les analyses statiques ont été réalisées en utilisant le logiciel STATISTICA (8.0). Nous avons appliqué le test ANOVA pour déceler la présence de différences entre les paramètres des espèces capturées.
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Résultats et discussion
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Composition spécifique
La mise en œuvre du protocole standardisé d’échantillonnage a permis la capture de 7 espèces de poissons (le mulet à grosse tête Mugil cephalus et le mulet porc Liza ramada (MUL), le gardon Rutilus rubilio (GAR), le sandre Sander lucioperca (SAND), le rotengle Scardinius erythrophtalmus (ROT), la carpe commune Cyprinus carpio (C.C) et la phoxinelle de la calle Pseudophoxinus callensis (P.C)). Aucun spécimen de silure (Silurus glanis) et d’anguille Anguilla anguilla n’ont été capturés malgré leur présence dans le barrage. Dans la littérature, trois autres espèces sont mentionnées à savoir le cyprinodonte rubané Aphianus fasciatus, la gambusie Gambusia affinis et le gobie marbrée Pomatoschistus marmoratus, mais ces derniers ne figurent pas dans les captures de notre échantillonnage.
Les campagnes d’échantillonnage par les filets multi-mailles fournissent essentiellement des informations sur la tendance des densités des poissons en se basant sur les CPUEs. De plus, l’utilisation de ces filets ne permet dans un aucun cas d’estimer la biomasse des stocks de poisson dans les barrages mais elle aidera à réaliser des comparaisons des CPUEs (Hubert 1996). Les rendements numériques et pondéraux des barrages tunisiens étudiés oscillent entre une valeur maximale (de l’ordre de 446,43ind/ 1000m² de filet et 28,75kg/ 1000m² de filet) au niveau du barrage de Lahjar et une valeur minimale (6,25ind/ 1000m² de filet et 0,67kg/ 1000m² de filet) au niveau du barrage Mlaabi (Mili and Laouar, 2014). Les rendements observés au niveau du barrage de Sidi Salem sont moyens sur le plan pondéral et numérique (8,081kg/1000m² filet et 144 individus /1000m² filet). Cette retenue est moyennement riche en ressources piscicoles (Figure 3).
Figure 3 : Comparaison des rendements de pêche des retenues de barrages tunisiennes (toutes espèces confondues). |
Les captures sur le plan numérique sont majoritairement dominées par le gardon (62,89%), suivi par le rotengle (22,47%) et le sandre (10,8%). Les captures pondérales sont aussi dominées par le gardon (47,91%). En deuxième position, on retrouve le rotengle avec un pourcentage de l’ordre de 21,85% suivi par et le sandre (16,43%). Ces espèces sont assez tolérantes en termes de zone de frayère et de la qualité de l’eau. La carpe commune semble en abondance globale déficitaire, les rendements numérique et pondéral sont très faibles (1,52 ind/1000m² et 0,525kg /1000m² de filet). Pour les mulets, l’état du rendement revêt d’un intérêt très limité malgré les déversements réguliers réalisés par le Centre Technique d’Aquaculture. L’état actuel des Mugilidés dans ce barrage est marqué par des rendements numériques et pondéraux très faibles (0,76 ind/1000m² et 0,475kg /1000m² de filet) (Tableau 3).
Tableau 3 : Abondances numériques et pondéraux des espèces ichtyques dans le barrage de Sidi Salem. |
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Dans cette étude, la richesse spécifique et les rendements de pêche sont assez faibles comme c’est le cas de la plupart des retenues de barrages en Tunisie. Ceci est dû à l’introduction récente des espèces et l’ensemencement annuel des alevins de muges. Jespersen et al. (2000) affirment que les captures par unité d’effort numérique et pondérale diminuent suite à l’augmentation de la concentration des nutriments. L’échantillonnage aux filets benthiques a permis de capturer 98% des spécimens et de fournir ainsi une meilleure représentation des ressources piscicoles dans le barrage de Sidi Salem. Certaines espèces comme l’anguille européenne Anguilla anguilla (L.), ou le silure Silurus glanis ne peuvent pas être pêché facilement à l’aide des filets maillants multi-mailles à cause de leurs morphologies, leurs comportements et leurs habitats préférés (Jeppesen et al. 2006).
Du point de vue groupes fonctionnels, les cyprinidés forment 88,67 % et 77,69 % respectivement du nombre et du poids des poissons contre 10,8 % et 16,43 % des prédateurs (Figure 4). Cette observation révèle que la retenue de Sidi Salem est riche en poissons carnassiers et fourrages et les populations de sandre, de barbeau et de rotengle qui y vivent sont dans un état d’équilibre. Dans la littérature, le pourcentage des poissons piscivores est considéré comme un indicateur de la qualité de l’eau (Søndergaard et al. 2005). Par conséquence, la biomasse piscivore potentielle, y compris toutes les classes de tailles, montre un équilibre au niveau du barrage de Sidi Salem. Dans notre étude, les communautés de poissons sont composées principalement de cyprinidés (gardon et rotengle) comme c’est le cas de la plupart des lacs en France (Deceliere-Vergès et Guillard 2008). Une étude similaire indique que l’abondance des espèces au niveau de la strate pélagique serait mieux évaluer par les campagnes hydroacoustiques à cause des biais d’échantillonnage qui peuvent être due au caractère passif des filet multi-mailles et au phénomène d’échappement observé chez les petits individus (Deceliere-Vergès et al. 2009).
A B |
Figure 4 : Structure des groupes fonctionnels (A : Pourcentage numérique ; B : Pourcentage pondéral). |
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Distribution spatiale des captures
Les différentes espèces colonisent majoritairement les strates tempérées supérieures à 12m. L’utilisation du test ANOVA (à p<0,05) a montré que la strate 0-3 m (p=0,000) présente des rendements les plus élevés correspondant à un pourcentage estimé à 41,46%. En effet, la strate 0-3 m s’avère la strate la plus occupée alors que la strate 6-12 est la plus diversifiée. Les captures sont majoritairement benthiques. La partie la plus profonde du barrage n’est pas assez fréquentée par la faune piscicole. Cette répartition peut être reliée à la quantité d’oxygène dissous dans la colonne d’eau (Figure 5).
Figure 5 : Distribution spatiale des captures dans le barrage de Sidi Salem |
La distribution spatiale et la survie des poissons semblent être fortement influencées par la teneur en oxygène et à la température. Nos résultats sont comparables à ceux de Vašek et al. (2009) qui ont trouvé que la majorité des poissons se localisent dans les couches superficielles. Djemali et al. (2010) indiquent qu’en allant de la digue vers l’amont, la distribution de la biomasse est influencée par la profondeur de l’eau. Ces auteurs affirment que les concentrations les plus importantes ont été enregistrées au niveau des couches superficielles des zones les plus profondes du barrage. La plupart des études récentes ont révélé que les populations de poissons sont influencées principalement par la profondeur du barrage ainsi que par la quantité de chlorophylle "a" qu’il contient (Mehner et al. 2005). Les communautés de poissons sont rarement réparties de façon homogène mais plutôt de manière aléatoire dans leur environnement. En effet, leur distribution est généralement influencée par les facteurs physiques, chimiques et environnementaux (Benson and Magnuson 1992; Borcard et al. 1992). En outre, les interactions biotiques telles que la concurrence peuvent modifier la répartition spatiale des poissons (Mehner et al. 2005). De plus, Fischer et Quist (2014) affirment que ce mode d’échantillonnage surestime la gamme moyenne de tailles dans les captures.
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Indices d’abondances
L’application de l’indice de Shannon (H’) aux données récoltées du barrage de Sidi Salem a montré que les peuplements piscicoles au niveau de cette retenue d’eau sont peu diversifiés étant donné que H’ (0,4) est inférieur à 1,5. L’Indice d’Equitabilité (E) enregistré au niveau de ce barrage est assez faible (0,3) indiquant la présence d’un déséquilibre dans la répartition des espèces. La quasi-totalité des effectifs tendent à être concentré en une seule espèce (le gardon). Carol et al. (2006) ont montré que la composition spécifique de la communauté des poissons et la variabilité de l’indice de Shannon sont fortement liées à la dégradation de l’environnement, donc l’étude de la richesse spécifique dans les eaux douces doit être prise avec prudence. Power (1987) affirme que l’augmentation de la profondeur peut diminuer la densité des poissons à cause de l’augmentation du risque de la prédation par les gros carnassiers.
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Structure des populations ichtyques
Les structures en tailles des peuplements de poissons d’eau douce sont en étroite relation avec les facteurs environnementaux. L’absence du petit maillage au niveau des filets utilisés induit une déficience de juvéniles dans les captures. Nos résultats sont en concordance avec ceux obtenus par Dekar and Magoulick (2007). En se référant à l’étude de Winfield et al. (2009), l’analyse des structures en tailles des poisons pêchés par les filets multi-mailles a montré que ces engins capturent plus d’individus de taille moyenne par rapport aux autres méthodes d’échantillonnage comme la pêche électrique.
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Structure des populations du gardon
La gamme de taille des captures s’échelonne entre 12,5 et 20,5 cm avec une moyenne de l’ordre de 15,48. Toutes les tailles obtenues appartiennent à des gardons de taille adulte. En effet, la maturité sexuelle de cette espèce est atteinte à l’âge d’une année soit une taille entre 7,8 et 8,5 cm (Djemali, 2005). La population de gardons affiche un état d’équilibre avec 2 classes d’âge recensées (II+ et III+) (Figure 6). Les stades alevins et juvéniles ne sont pas présents dans nos captures étant donnée que la taille de maille minimale utilisée dans la pêche est de 18 mm. Introduit comme poisson fourrage pour l’alimentation du sandre, le gardon parait avoir trouvé des conditions acceptables pour accomplir son cycle biologique dans la retenue de barrage. Cependant, le gardon du barrage de Sidi Salem semble subir une forte prédation et/ou pêche qui cible essentiellement les individus les plus âgés.
Figure 6 : Histogramme des fréquences des tailles du gardon |
La gamme de taille des captures du sandre oscille entre 13,2 et 36,2 cm avec une moyenne de 21,46 cm. A priori, quatre classes d’âges ont été capturées (0+, I+, II+ et III+). La population du sandre de Sidi Salem est largement dominée par les juvéniles, ce qui reflète les bonnes conditions de reproduction et de survie au niveau de cette retenue (Figure 7). La majorité des specimens capturés sont adultes étant donné que la maturité sexuelle de ce poisson est atteinte à l’âge d’une année pour une taille de 24 cm et un poids de 90g (Toujani et al. 2000). Les cohortes témoignent d’une dynamique de population globalement satisfaisante, mais on a remarqué un net écrêtage des individus adultes lié à la pression de pêche au niveau de ce plan d’eau.
Figure 7 : Histogramme des fréquences des tailles du Sandre |
Les gammes de tailles du rotengle s’échelonnent entre 12,2 à 22,2 cm avec une moyenne de 16,46 cm. Le rotengle du barrage Sidi Salem présente 2 classes d’âges (I+ et II+) (Figure 8). La population échantillonnée, est constituée exclusivement d’adultes étant donné que la maturité sexuelle de cette espèce est atteinte à l’âge d’un an soit une taille entre 7,9 et 8,5 cm (Djemali 2005). Le rotengle subit une forte prédation et/ou pêche qui cible essentiellement les individus les plus âgés, comme le cas observé du gardon.
Figure 8: Histogramme des fréquences des tailles du rotengle dans le barrage de Sidi Salem. |
Les gammes de tailles de la carpe s’échelonnent entre 21 et 42 cm. Avec 2 classes d’âges, la majorité des tailles obtenues appartiennent à des classes de tailles d’individus juvéniles. En effet, la maturité sexuelle de cette espèce est atteinte à l’âge d’un an pour les mâles et 2 ans pour les femelles correspondant à des tailles respectivement de l’ordre de 27-28cm et 40cm.
La gamme de taille des individus capturés oscille entre 13 et 15 cm. Une faible abondance de la phoxinelle de la cale est bien nette au niveau du barrage de Sidi Salem. Une seule classe d’âge de cette espèce a été pêchée dans cette retenue. L’introduction des espèces carnassières dans les retenues de barrages tunisiennes a causé l’effondrement des peuplements piscicoles autochtones dont notamment la phoxinelle de la calle et le barbeau.
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Les muges
Uniquement deux spécimens de Liza ramada de 20,5 et 37 cm et un spécimen de Mugil cephalus de 50 cm ont été capturés. Ce manque d’effectifs montre que ces espèces sont fortement ciblées par les pêcheurs au niveau de cette retenue de barrage. Les mugilidés dans la retenue de barrage de Sidi Salem semblent en état de surexploitation. La maturité sexuelle des mugilidés est atteinte à une taille entre 26,5 et 34 cm (Fischer et al. 1987) ce qui affirme que les spécimens capturés sont adultes. Une étude récente de la croissance de Liza ramada a montré la présence de 10 classes d’âges pour cette espèce et 8 seulement pour le mulet à grosse tête au niveau du barrage de Sidi Barrak (Mili et al. 2015). La faible représentation des jeunes cohortes peut être expliquée par la réticence des pêcheurs à l’achat des alevins au cours des années précédentes. Les mulets sont ensemencés chaque année par le Centre Technique de l’Aquaculture. Les alevins sont pêchés des embouchures des oueds et ensemencés dans la plupart des retenues de barrages tunisiennes. L’arrêt des opérations d’ensemencement des muges dans le barrage de Sidi Salem aura des conséquences économiques négatives sur les revenues des pêcheurs dans cette retenue au cours des années à venir.
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Relations morphomériques
La relation liant la longueur totale des poissons à leurs poids et à la longueur standard est la suivante : Pt=a*Ltb et Lt=a*Lstb, Pt est le poids total du poisson en gramme, Lt sa longueur totale en cm, Lst sa longueur standard en cm, a et b sont des facteurs caractéristiques du milieu et de l’espèce (Kraiem 1989). Les relations morphométriques ont été déterminées uniquement pour le gardon, le sandre et le rotengle à cause des faibles effectifs des autres espèces. Les modèles mathématiques de la relation taille-poids révèlent la présence d’une forte liaison entre le poids total et la longueur totale chez les trois espèces. Les relations liant le poids à la longueur pour les populations de gardon, rotengle et sandre au niveau du barrage de Sidi Salem montrent que les coefficients d’allométrie sont inferieurs à 3 (Tableau 4). L’allométrie chez ces populations est alors minorante avec une croissance en longueur plus rapide que le cube du poids. Par contre, le coefficient d’allométrie liant la longueur totale à la longueur standard est supérieur à un chez ces espèces, d’où l’allométrie est majorante.
Tableau 4 : Equations morphométriques chez lez principales espèces ichtyques dans le barrage de Sidi Salem (Signification du test d’allométrie t au seuil de confiance 95%). |
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Espèce |
Relation |
Allométrie |
Test d’allométrie |
R2 |
Gardon |
Lt = 1,082 Lst1,38 |
Majorante |
t =5,37>1,76 |
R2 = 0,8 |
Pt = 0,016 Lt2,86 |
Minorante |
t =4,52>1,66 |
R2 =0,86 |
|
Sandre |
Lt = 1,164 Lst1,01 |
Majorante |
t =6,42>1,76 |
R2 = 0,987 |
Pt = 0,0672 Lt2,298 |
Minorante |
t =2,32>1,66 |
R2 =0,943 |
|
Rotengle |
Lt = 1,189 Lst1,58 |
Majorante |
t =3,24>1,76 |
R2 = 0,921 |
Pt = 0,0166 Lt2,87 |
Minorante |
t =3, 48>1,66 |
R2 = 0,76 |
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Conclusion
La mise en œuvre du protocole d’échantillonnage selon la norme CEN prEN 14757 moyennant des filets multi-mailles dans la retenue du barrage de Sidi Salem a permis d’avoir des rendements moyens sur le plan numérique et pondéral. L’étude des peuplements piscicoles réalisée au niveau du barrage de Sidi Salem a montré que cette retenue d’eau est caractérisée par une forte abondance du gardon et du rotengle. Introduits comme poissons fourrages, ces deux espèces à caractère phytophile, paraissent avoir un bon succès de reproduction. La population du sandre, dominée par les juvéniles, apparaît également assez dynamique et en état d’exploitation maximal. Et ce malgré l’absence de gros spécimens dans les captures. Les populations du sandre, du gardon et du rotengle semblent être fonctionnelles et en état d’équilibre fragile. Elles ne nécessitent, à priori, aucun soutien spécifique de la part des gestionnaires halieutiques. Le stock de muges semble être en état critique de surexploitation à cause de l’effort de pêche intense et l’arrêt d’ensemencement des alevins suite à la réticence des exploitants à payer les frais d’ensemencement.
L’absence du silure et de l’anguille dans notre échantillonnage malgré sa présence dans le barrage peut être expliquée par leur faible vulnérabilité aux filets maillants ainsi qu’à la période d’échantillonnage pendant laquelle ces espèces ont une mobilité réduite. Un complément d’échantillonnage avec l’utilisation d’autres techniques d’échantillonnage comme la pêche électrique et l’échosondage fournira plus d’informations sur l’état d’exploitation des ressources piscicoles dans la retenue du barrage de Sidi Salem.
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Remerciements
Nous remercions Sabri ADOULI, Arij ZAATOURI et Dalel KAMEL pour l’effort qu’ils ont déployé lors de la réalisation de la partie expérimentale de ce travail.
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Bibliographie
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