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The role of institutions in improving the productivity of the olive sector in Tunisia
Le rôle des institutions dans l’amélioration de la productivité du secteur oléicole en Tunisie
AICHA MOKRANI1
MOHAMED BÉCHIRSAI2
JAMEL BEN NASR1
MOHAMED SALAH BACHTA1
1Agronomic National Institute of Tunisia ;43 Avenue Charles Nicolle, Tunis, 1082.
2Olive Tree Institute ; Avenue H. karray, bélvédère, Tunis, 1002.
Abstract - Does the institutional environment of public policy respond to improve the olive oil sector productivity? We adopted a methodology containing a qualitative analysis through the crossing "Three I" to sequencing and a quantitative analysis through an economic model allowing the estimation of added value. Therefore, the problematisation and formulation of public action reveal a patchwork of interactions between these three variables at implementation level. How? In the field, the instruments that have attracted the majority of producers interest are absents. In addition, a significant abyss established between public action and certain producers. It is at the origin of the low instruments effect on the producer’s behavior and informal institutions guide strongly their strategies. Why? Because the debates and decisions do not involve a significant number of existing actors’ categories. Besides a dominant technical aspect, the diagnosis and solutions formulation do not consider certain categories of interests and perceptions of producers. Along the three sequences, the “ideas” of public decision makers justified by its “interests” seem having a significant explanatory weight. As for the results of the model, it shows that the area has a positive and significant effect on added value. The farms distribution has made explicit the existence of efficient farms of modernized and traditional types. Thus, the results of the model are complementary to the qualitative analysis by highlighting the complexity of the situation of the olive sector to the improvement in productivity resulting in its slow growth.
Keywords: olive producers, public policy, approach “Three I”, sequencing, actor’s strategy.
Résumé-Dans quelle mesure la configuration institutionnelle permettrait-elle de réaliser des gains de productivité dans le cadre de la politique publique ? Pour ce faire, nous avons adopté une méthodologie renfermant une analyse qualitative moyennant le séquençage croisé aux « Trois I » et une analyse quantitative moyennant un modèle économique permettant l’estimation de la valeur ajoutée. Ainsi, la problématisation et l’élaboration de l’action publique ont engendré une mosaïque d’interaction entre les trois variables au niveau de la mise en œuvre. Comment ? Sur le terrain, les instruments politiques ne répondent pas aux intérêts de la majorité des producteurs. De plus, un important abîme est établi entre l’action publique et certains producteurs. Cette situation est à l’origine de la faible influence des instruments sur leurs comportements au profit des institutions informelles qui guident fortement leurs stratégies. Pourquoi ? Parce que les débats et les décisions prises n’impliquent pas un grand nombre de catégories de producteurs existantes. Outre la dominance de l’aspect technique, le diagnostic et la formulation des solutions ne considèrent pas certaines catégories d’intérêts et de perceptions des producteurs. Tout au long des trois séquences, les idées des décideurs publics justifiées par leurs intérêts semblent avoir un poids explicatif important. Les résultats du modèle montrent que la superficie a un effet positif et significatif sur la valeur ajoutée. La répartition des exploitations a explicité l’existence des exploitations performantes de types modernisées et traditionnelles. Ainsi, les résultats du modèle sont complémentaires à l’analyse qualitative en mettant en valeur la complexité de la situation du secteur oléicole pour l’amélioration de la productivité entrainant sa faible croissance.
Mots clés: oléiculteurs, politique publique, approche« Trois I », séquençage, stratégies des acteurs
1. Introduction
La forêt oléicole compte actuellement environ 88 millions d’oliviers couvrant 1880000 ha (ONH 2017). En Tunisie, le secteur oléicole est l’un des principaux secteurs stratégiques de l’économie en général et de l’agriculture en particulier. Effectivement, il contribue à la réalisation des objectifs nationaux tels que le développement économique et social, l’auto insuffisance alimentaire, l’équilibre de la balance commerciale et la réduction du chômage. Cette culture contribue totalement ou partiellement à la génération desrevenus de 310000 agriculteurs qui représentent près de 60% du total des agriculteurs en Tunisie (ONH2017). Les zones oléicoles sont réparties sur les différents systèmes agro-écologiques, du Nord au Sud. Grâce à ce potentiel de production, la Tunisie est le quatrième producteur mondial de l’huile d’olive (6% de la production mondiale (ONH 2017)) et le deuxième exportateur de ce produit après l'UE. Les exportations tunisiennes représentent environ 80% de sa production, soit en moyenne 150000T/an (MARHP 2016). Malgré les résultats indéniables obtenus au niveau du secteur oléicole et son importance à l’échelle nationale et internationale, il n’a pas atteint les objectifs fixés qui lui ont été assignés par les pouvoirs publics. D’importantes améliorations sont encore à réaliser et ce, en dépit de la politique mise en œuvre pour son développement. En effet, l’évolution de la productivité du secteur oléicole est marquée par une faible croissance. Dans ce papier, nous nous intéressons à étudier l’effet des institutions sur les gains de productivité envisagés dans le cadre de la politique mise en œuvre. Ce constat nous a conduits à se poser une question cruciale : Dans quelle mesure la configuration institutionnelle permettrait-elle de réaliser des gains de productivité dans le cadre de la politique publique ? A cet effet, la suite du texte sera organisée en deux sections. La première présentera la méthodologie qui suivra une analyse qualitative passant par trois étapes. La présentation de l’analyse de la politique publique par le croisement des « Trois I » au séquençage. L’application du cadre d’analyse retenu à la politique publique visant l’amélioration de la productivité. Etl’utilisation de l’outil méthodologique dans notre cas du secteur oléicole en Tunisie, s’ajoutant à une analyse quantitative pour situer les différentes stratégies selon la valeur ajoutée de leur exploitation. La deuxième exposera les résultats obtenus des analyses qualitative et quantitative et leur discussion. Le tout est assorti d’une conclusion.
1. Matériels et méthodes
1.1. La place des institutions dans le formatage des comportements des acteurs
La documentation théorique portant sur la productivité et son interaction avec les institutions (Billaudot 2005 ; Cette et al. 2008 ; Howitt 2004) nous a permis d’aboutir à la conceptualisation du lien entre institutions et productivité qui est tissé à travers le comportement économique de l’individu et les choix qu’il fait dans son environnement institutionnel. De plus, le courant néo-institutionnaliste étudie les comportements des individus (explication et compréhension) en subissant l’influence des institutions. Ces trois courants : sociologique, historique et du choix rationnel sont à l’origine des « Trois I » (Hall et Taylor 1997). Les « Trois I » est une approche d’analyse de politique publique permettant la détermination des variables de l’analyse (Idées, Intérêts et Institutions) à partir des trois néo-institutionnalismes dont les institutions sont définies par Peter Hall comme étant un ensemble de contraintes socialement construites qui permettent de mieux appréhender les comportements des individus et des organisations dans l’espace public… (Surel 2002).
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Figure 1 : Schéma d’interaction des trois variables « Trois I » pour façonner le choix politique Elaboration à partir de la théorie et la littérature pertinentes consultées (Gauvin 2014). |
En effet, les intérêts sont à l’origine des idées formulées. Les connaissances de l’individu, ses représentations et ses perceptions sont relatives à ses intérêts. Quant aux institutions sont présentes pour organiser les idées. Comment les « Trois I » se présentent dans notre cas de politique publique au niveau du secteur oléicole ? Il en ressort que l’impact des institutions et les gains de productivité varient selon les catégories de comportement du producteur (stratégie). L’effet des institutions sur les choix des producteurs dépend de leurs intérêts, idées et institutions. L’application de l’analyse par les « Trois I » exige son croisement au séquençage qui est une grille séquentielle élaborée par Jones (Pallier et Surel 2005 ; Surel 2014). Il s’agit de l’interaction des trois variables et leur évolution au fil du séquençage qui représente le processus politique en aboutissant au résultat de la politique publique. Comment ce séquençage croisé aux « Trois I » se présente dans notre cas ? (Flexor ; Jacquot 2014 ; Le Galés et Lascoumes 2014 ; Muller 2013 ; Thoeing 2014). Ainsi, nous allons essayer d’analyser la politique publique en considérant l’interaction entre les différents acteurs dans leur contexte politico-institutionnel, dans le but de mettre en évidence le comportement de la population cible vis-à-vis des instruments. Il s’agit de la compréhension de leur comportement qui explique à la fois l’enregistrement des gains de productivité et façonne le résultat de la politique publique.
1.2. Adoption de la méthodologie
Pour ce faire, nous nous sommes basés sur des textes officiels de politique pour expliciter les orientations (instruments) de la politique publique mise en œuvre (Plansquinquennauxde développement de 1992 à 2011, le Journal Officiel de la République Tunisienne) et rapports et études scientifiques concernant le secteur oléicole (ACC 2009 ; Jackson and al. 2015 ; Karray 2012 ; Office de développement du Nord-ouest 2017). Le dispositif institutionnel du secteur oléicole est marqué par des institutions existantes et d’autres nouvelles. Il s’agit de la législation des instruments de la politique publique. Les instruments en termes de subventions, prêts, crédits et vulgarisation permettent l’augmentation de la production oléicole. L’action publique incite les producteurs à l’extension des superficies par les subventions pour les nouveaux vergers, rajeunissement, superficies irriguées et en système intensif ou à l’amélioration de la productivité par l’irrigation, l’utilisation de fertilisant et l’adoption des traitements contre la maladie. Également, la vulgarisation représente la diffusion de l’information concernant les nouvelles techniques de conduite de l’oliveraie. Ce dispositif mis en œuvre à l’échelle de l’exploitation favorise l’amélioration de la productivité du secteur oléicole. Quant aux nouvelles institutions, elles se rapportent, principalement, à la commercialisation et l’exportation de l’huile d’olive, ne pouvant être à l’origine de l’amélioration de la productivité.
Tableau 1 : Synthèse des différents acteurs et leurs stratégies ; élaboration propre à partir de la documentation et connaissances du terrain. |
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Les acteurs |
Stratégies |
Les pouvoirs publics |
-L’augmentation de la productivité, -l’extension des superficies oléicoles intensives et irriguées -et le rajeunissement des plantations. |
Les producteurs d’olives
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-Stratégie d’extension avec conduite traditionnelle -Stratégie de suivre la conduite traditionnelle -Stratégie d’extension avec adoption de la technologie -Stratégie d’adoption de la technologie |
Ce tableau résume les différents acteurs possibles d’interagir dans le cadre de la politique publique du secteur oléicole en explicitant leurs multiples stratégies.
1.3. Application dans les faits
L’analyse de la politique publique a suivi une perspective dynamique. Elle porte sur une période allant de 1994 jusqu’à aujourd’hui afin de mettre en évidence son évolution. Il s’agit donc d’une appréciation de faisabilité politico-institutionnelle de la politique publique conçue pour l’amélioration de la productivité.
Chaque intérêt est influencé par des institutions existantes et justifient des idées formulées par les producteurs conduisant à leur stratégie adoptée (comportement). Dans ce cas, les mécanismes institutionnels en présence qui organisent le secteur oléicole se présentent comme dans le tableau 2. Des institutions formelles désignant les instruments de la politique publique mise en œuvre. Théoriquement, les instruments sont des institutions au sens sociologique du terme : un ensemble plus ou moins coordonné de règles, de normes et de procédures, qui gouverne les interactions et les comportements des acteurs et des organisations. Les institutions fournissent ainsi un cadre stable d’anticipations qui réduit les incertitudes et structure l’action collective (Le GalèsetLascoumes 2014). Et d’autres informelles comme il a été explicité par les interviews. En effet, nous avons adopté une méthodologie de collecte d’informations par des interviews menés dans le gouvernorat deSiliana, auprès des 16 producteurs d’olives représentants les différentes stratégies de conduite de l’olivier(tableau 1). Le guide des interviews a été élaboré en fonction des objectifs (intérêts) des producteurs s’ajoutant à d’autres caractéristiques portant sur leursituation socioéconomique (revenu, niveau d’instruction, savoir-faire agricole …), leurperception du secteur oléicole et de la politique publique, les problèmes rencontrés, leur vie sociale, leurrelation avec l’administration et leurinteraction avec les instruments.
Tableau 2 : Description des institutions retenues dans l’analyse ; élaboration propre à partir de la documentation et les interviews |
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Les institutions retenues |
Descriptions |
Les instruments : institutions formelles |
-subventions, prêts, vulgarisation, formation et encadrement ; -ces instruments qui sont censés guider les choix stratégiques de tous les producteurs, ilsinfluencent seulementet réellement les producteurs modernisateurs. |
Les institutions informelles |
-Les règles, pratiques, habitudes de conduite traditionnelle de l’olivier en général. - L’organisation locale du secteur entre les producteurs se caractérise par une légitimité sociale attribuée à un leader dans la zone de production qui dicte les règles de conduite de l’olivier généralement héritées du passé, en se basant sur son savoir-faire et son expérience dans le secteur oléicole. -Pour la modernisation, il y a recours à des experts dans le secteur oléicole qui renseignent sur les règles de conduite moderne. -Un autre type d’organisation qui se base sur l’échange d’informations entre les producteurs de la même zone pour la conduite de l’olivier ou autres. |
La perception des institutions informelles par les producteurs est étroitement liée à leur représentation du secteur oléicole (comme il est confirmé par les interviews). Quant à la perception des instruments varient selon les stratégies. Elles offrent aux modernisateurs un modèle de comportement à suivre, en adoptant les différents instruments qui permettent l’amélioration de la productivité. Quant auxproducteurs de la conduite traditionnelle, les instruments ne représentent quasiment rien pour eux (cequi a été mis en valeur par les interviews).
Tableau 3 : Présentation théorique du séquençage croisé aux « Trois I » ; élaboration propre inspirée de Pallier et Surel (2005) et Surel (2014). |
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Les séquences |
Contenu théorique |
Interprétation |
L’identification du problème |
L’émergence du problème repose sur la perception et les intérêts des acteurs pour faire le diagnostic de la situation. |
Cette phase fait appel aux différents intérêts et perceptions des différents acteurs concernés par la politique publique. |
L’élaboration des solutions |
C’est la concrétisation des idées formulées sous forme de nouveaux instruments à mettre en œuvre. |
Les solutions formulées par la suite représentent les idées des acteurs basées sur leurs intérêts. |
La décision |
C’est la légitimation ou formalisation des solutions élaborées. |
La décision consiste à institutionnaliser ou formaliser les solutions élaborées suivant les intérêts dominants. |
La mise en œuvre |
L’application des nouveaux instruments afin de réaliser des changements des préférences et des façons de faire traditionnelles. |
Instruments mis en œuvre sur le terrain jouant le rôle des institutions. Cette séquence fait intervenir les trois variables au même temps. |
Pour appréhender le fonctionnement économique des exploitations oléicoles et estimer les résultats obtenus. Nous avons élaboré un modèle économique permettant d’estimer la valeur ajoutée en fonction des facteurs primaires de production (capital, superficie et main d’œuvre familiale) moyennant la régression linéaire à l’origine(OLS). Elle est mesurée comme suit :
VA= production- consommation intermédiaire
Cette valeur ajoutée vise la performance et l’amélioration de la productivité de l’exploitation. Un tel modèle permet de dispatcher les exploitations oléicoles étudiées en deux grandes catégories. Une catégorie dont la valeur ajoutée rémunérant les facteurs de production fixes est supérieure à la valeur ajoutée estimée. Une autre dont la valeur ajoutée enregistrée est inférieure à la valeur ajoutée estimée. Pour ce faire, nous avons collecté des données sur la production relative à notre échantillon de l’étude : capital, superficie, main d’œuvre (taille et récolte), eau, labour, fertilisant. Ainsi, l’analyse quantitative permet de compléter l’analyse qualitative présentée auparavant.
2.Résultats et discussion
2.1. L’analyse qualitative
2.1.1. La problématisation
L’amélioration de la productivité, son inscription sur l’agenda politique existaitdepuis le 8ème plan de développement (1992-1996). Son importance s’est accentuée au fil des plans de développement. D’après le tableau 4, le diagnostic de la situation repose sur les intérêts et les perceptions d’une catégorie particulière de producteurs en marginalisant les autres types d’intérêts. Ces conditions caractérisent également la phase d’élaboration des solutions. En effet, depuis la problématisation à la formulation des solutions, les différents intérêts des « modernisateurs » sont en concordance avec les solutions formulées puisque certains producteurs adoptant la technologie affirment que les instruments répondent à leurs intérêts en adoptant les différents instruments (encadrement, vulgarisation et subventions).
Tableau 4 : Synthèse des séquences de la politique publique du secteur oléicole ; élaboration propre à partir de la documentation et des interviews. |
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Les séquences |
Application au cas de la production des olives en Tunisie |
L’identification du problème |
Les pouvoirs publics : améliorer la production de l’olivier pour améliorer l’exportation de l’huile d’olive. Les producteurs modernisateurs : augmentation du revenu principalement. Les idées sont de nature technique. A ce niveau c’est l’intérêt et la perception du problème par les pouvoirs publics et les producteurs modernisateurs qui sont à la base du diagnostic. |
L’élaboration des solutions |
Les solutions sont élaborées par les différentes administrations en concertation avec les producteurs modernisateurs qui sont en connivence avec elles. Les idées sont exclusivement de nature technique. Les solutions ne sont pas formulées en concertation avec la majorité des producteurs. |
La décision |
Elle est prise par l’administration en concertation avec les directions centrales et régionales qui lui sont rattachées. |
La mise en œuvre |
-Les instruments sont : vulgarisation, encadrement, formation, prêts, subventions. -Les instruments répondent aux intérêts des producteurs modernisateurs. -Manque d’organisation des instruments mis en œuvre sur le terrain. -Les producteurs s’intéressent à certains instruments qu’ils font défaut sur le terrain. -Pas de changement de préférences ni de façon de faire pour la majorité des producteurs. - La mise en œuvre est de type top-down pour la majorité des producteurs. -Les institutions informelles organisent par excellence les relations entre les producteurs. -Il s’agit d’un héritage politique du secteur oléicole dont la dynamique institutionnelle est caractérisée par des adjonctions institutionnelles concernant la commercialisation et l’exportation de l’huile d’olive. |
La relation des producteurs avec l’administration et leurs perceptions de la politique publique (instruments) montrent que les débats et les prises de décisions n’engagent pas un nombre important des catégories existantes d’acteurs.
Tableau 5 : Perception de la politique publique (instruments) par les producteurs et leur relation avec l’administration selon les stratégies ; élaboration à partir des interviews |
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Stratégies |
Perception de la politique publique (instruments) |
Relation avec l’administration |
L’extension avec conduite traditionnelle |
-la politique publique répond exclusivement aux intérêts des grands producteurs et collecteurs s’ajoutant à un manque d’intervention de la part des acteurs publics à leurs yeux. |
-un contact limité entrainant l’acquisition d’une information incomplète concernant les instruments mis en œuvre. |
Suivre la conduite traditionnelle |
-la politique publique n’a pas de signification particulière pour les producteurs. -les producteurs connaissent vaguement les instruments. |
-très peu de contact |
Adopter la technologie |
-Ils connaissent et adoptent les instruments. -certains producteurs sont impliqués indirectement par la politique publique. |
-Un contact avec l’administration mitigé entre continu et occasionnel. -Ils modernisent leur exploitation. |
Extension avec adoption de la technologie |
-Certains croient toujours à la politique d’intervention véhiculée par l’Etat. -Ils adoptent les instruments pour moderniser leurs exploitations. |
-Contact continu. |
La situation présentée dans le tableau 5 indique que certains producteurs n’ont pas contribué à la formulation des idées et solutions de l’action publique. En effet, certains producteurs de la stratégie d’adoption de la technologiereprochent à la procédure d’adoption des instruments d’être compliquée avec un manque de concertation avec tous les opérateurs dans la prise de décision. Ceci révèle l’existence d’un problème d’échange d’information assez important entre les différents acteurs impliqués par la politique publique. Par conséquent, un abîme assez important s’est installé entre l’action publique et plusieurs types d’intérêts ayant des stratégies différentes. Ce qui peut restreindre le cadre cognitif des producteurs d’olives à leurs connaissances déjà acquises pour la conduite de leur oliveraie. Ainsi, le comportement (stratégie de conduite traditionnelle) adopté par la majorité des acteurs est le résultat des idées dominantes existantes concernant l’olivier. En effet, les producteurs se trouvent inertes par rapport à l’objectif de l’action publique ayant d’autres intérêts qui motivent leur stratégie, étant en équilibre institutionnel avec les deux autres variables. Dans notre cas, ils ne réagissent pas en mobilisation et ils ne les adoptent pas non plus. Ils puisent dans leur stock de connaissances et pratiques de leur registre d’action.
2.1.3. La décision
Ces solutions formulées sont instituées depuis les années 1960. Au fil du temps, il y a eu leur renforcement par des modifications dans le contenu des instruments (l’aspect technique). De ce fait, la dynamique institutionnelle de l’action publique est caractérisée par des adjonctions institutionnelles. Ce sont la formalisation de nouvelles solutions importées de l’étranger telle que le mode de conduite hyper-intensif, que les instances de développement ont jugé efficace pour le développement du secteur oléicole, notamment l’amélioration de la faible croissance de la productivité. Étant donné que ces modèles de solutions ont réussi dans leur pays d’origine comme l’Espagne.
2.1.4. La mise en œuvre
La problématisation et l’élaboration de l’action publique ont engendré au niveau de la mise en œuvre une mosaïque d’interaction entre les intérêts, les idées des producteurs et les institutions.
Interaction 1 : En effet, les producteurs de différentes stratégies pensent que l’olivier est rentable, moins coûteux et moins exigent que les autres activités exploitées, possible de le gérer à distance, résistant à la sécheresse et il permet la valorisation des sols accidentés. Cette compréhension commune du secteur oléicole, chez tous les producteurs, est le résultat d’un héritage culturel et social.
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Figure 2 : L’interaction entre les Idées, les Intérêts et les Institutions au niveau de la mise en œuvre ; Élaboration propre à partir des interviews. |
Interaction 2 : En effet, les producteurs suivant lesstratégies de suivre la conduite traditionnelle et l’extension avec conduite traditionnelle interprètent l’Etat comme un Etat exclusivement interventionniste qui doit les aider et les soutenir (financièrement, techniquement…) à chaque étape de la conduite de l’olivier. Quant aux « modernisateurs », d’un côté, leur interprétation de la politique et du rôle de l’Etat converge avec les idées que véhicule la politique de développement du secteur oléicole. D’un autre, l’Etat est représenté par les services agricoles qu’il offre pour aider l’agriculteur et le soutenir à moderniser son exploitation.
Interaction 3 : En effet, l’interaction avec les instruments est quasi absente pour le groupe de l’extension avec conduite traditionnelle. Soit, ils possèdent leurs propres matériels nécessaires pour la conduite de l’olivier. Soit, ils se montrent intéressés par la vulgarisation et l’encadrement alors que cet instrument s’affiche relativement inefficient et absent dans leur zone de production. Pour cette raison qu’ils ont eu recours à d’autres formes d’organisations informelles. Alors que le groupe d’adoption de la technologie, leur interaction avec les instruments est reflétée par leur adoption des subventions (l’achat de plants, de fertilisants, l’irrigation) et l’encadrement technique. Également, ils affirment l’absence de vulgarisation accentuée par la sortie en retraite d’un grand nombre des agents de développement et par la rareté de plus en plus accrue d’organisation des journées d’informations. Par exemple, au sein du groupe qui adopte la technologie, certains producteurs jouissent de leurs propres connaissances concernant les nouveautés ou bien ils bénéficient des conseils d’un expert.
Interaction 4 : Comme il est le cas du groupe qui suit la conduite traditionnelle et celui qui fait l’extension avec conduite traditionnelle. Les intérêts de chaque stratégie subissent de la même manière l’influence des institutions informelles et des instruments.
Interaction 5 : Comme il est présenté dans le tableau 6.
Tableau 6 : Les différents intérêts des producteurs par stratégie ; élaboration propre à partir des interviews. |
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Stratégies |
Différents types d’intérêts |
Extension avec conduite traditionnelle |
-l’augmentation du revenu par l’extension ; la conservation de la force de travail familiale ; diversification des sources de revenu ; creusage d’un puits ou un forage. |
Suivre la conduite traditionnelle |
-la recherche d’identité foncière ; diversification du revenu agricole ; -une augmentation du revenu soit par la modernisation soit par l’extension mais des contraintes les empêchent. |
Extension avec adoption de la technologie |
-l’augmentation du revenu par l’extension avec modernisation |
Adoption de la technologie |
-l’augmentation du revenu par la modernisation et du bien-être -valoriser un patrimoine familial |
Cette situation de mosaïque est aussi expliquée par le niveau de revenu du producteur, la contribution de ses enfants dans le revenu, par le niveau de son savoir-faire agricole, le type de lamain d’œuvre et les problèmes rencontrés (d’infrastructure pour l’eau d’irrigation accentuée par la pénurie d’eau existante, un problème d’accès à l’exploitation, problème financier, la rareté et le coût élevé de la main d’œuvre, problèmes d’informations et de maladie). Par exemple, malgré sa décision d’adopter la technologie, le producteur se trouve incapable d’acquérir l’information auprès des acteurs publics à cause d’un problème d’infrastructure concernant l’accès. D’autres affirment qu’ils maintiennent leur conduite traditionnelle par obligation à cause des conditions difficiles de leur exploitation en ambitionnant de moderniser un jour. Encore, la situation de l’implémentation de l’action publique peut être expliquée par un problème de confiance entre l’acteur public et le producteur, le poussant à agir selon la conduite traditionnelle. Puisqu'il se plaint de la non réponse de ces acteurs à ses requêtes « des promesses sans réalisation concrète » et aussi des réponses trop générales qu’il reçoit, ne répondant pas à son interrogation.Ce qui peut renforcer la faible influence des instruments mis en œuvre sur les choix stratégiques des producteurs et justifient la persistance d’autres instituions informelles qui influencent fortement leur stratégie (l’extension avec conduite traditionnelle et de suivre la conduite traditionnelle). Par conséquent, les instruments n’ont pas entrainé un changement considérable des préférences dans leurs comportements pour améliorer la productivité. Par exemple, certains producteurs modernisateursutilisent principalement les fertilisants comme technique moderne de conduite de l’olivier. Donc, malgré la réforme de la politique publique en 1994, les instruments prescrits de la politique publique au niveau de la production des olives sont restés les mêmes avec quelques adjonctions institutionnelles ainsi que les cartes mentales de la majorité des producteurs d’olives résistent au changement, contraignant l’orientation vers l’amélioration de la productivité.
2.2. L’analyse quantitative
Les variables explicatives de ce modèle expliquent la variable dépendante à 93% avec un Ajusted R-squared égal à 92%. La variable superficie (SAU) a un effet significatif et positif sur la valeur ajoutée. En effet, l’importance de la taille de l’exploitation permet d’améliorer la valeur ajoutée et avoir des exploitations plus performantes. La variable capitale a un effet positif et non significatif sur la valeur ajoutée.
Tableau 7 : Les résultats de l’estimation de la valeur ajoutée Variable dépendante : VA |
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Coefficient |
Erreur standard |
t-statistic |
Prob. |
CAPITAL |
0,016 |
0,011 |
1,530 |
0,150 |
SAU |
975,997 |
345,571 |
2,824 |
0,014 |
MOf |
-744,65 |
585,231 |
-1,272 |
0,226 |
R-squared |
Ajusted R- squared |
|||
0,938 |
0,924 |
Les producteurs modernisent leur exploitation mais ils affrontent des problèmes qui contraignent l’obtention des résultats souhaités. Également, la main d’œuvre familiale (MOf) a un effet négatif et non significatif sur la valeur ajoutée. Toutefois l’interprétation du signe se fait par une MOfnon ou peu qualifiée qui est présente au niveau de l’exploitation oléicole. Les producteursayant des exploitations traditionnelles sont peu formés en technique de conduite de l’olivier. Cette faible technicité est à l’origine des baisses des rendements au niveau de ces exploitations.
Au niveau de la figure 3, la valeur ajoutée estimée représente l’équilibre à long terme de la rémunération des facteurs de production par la valeur ajoutée. Ainsi, la figure met en valeur deux grandes catégories : La 1ère catégorie se caractérise par une VA_obsv≥VA_estimée. La valeur ajoutée qui rémunère les facteurs de production fixes (capital, SAU et MOf) est supérieure à la valeur ajoutée estimée. Certains producteursfont partie des groupes qui adoptent la technologie et qui suivent la stratégie d’extension avec adoption de la technologie (9, 8,6), en subissant l’influence des instruments encourageant à l’amélioration de la productivité.D’autresfont partie du groupe dont la stratégie est l’extension avec conduite traditionnelle. Ces exploitations enregistrent les valeurs ajoutées les plus élevées au niveau de leur groupe respectif.
Figure 3 : La répartition des exploitations oléicoles en fonction de leur valeur ajoutée |
La 2ème catégorie se caractérise par une VA_obsv≤VA_estimée. La valeur ajoutée qui rémunère les facteurs de production fixes (capital, SAU et MOf) est inférieure à la valeur ajoutée estimée. Certains producteurs suivent la stratégie de suivre la conduite traditionnelle et l’extension avec conduite traditionnelle (1, 2, 3, 4, 14). Ils n’adoptent pas de la technologie tout en pratiquant les pratiquesculturales de conduite de l’olivier héritées du passé. D’autres suivent la stratégie d’adoption de la technologie et l’extension avec adoption de la technologie. Ces exploitations enregistrent les plus petites valeurs ajoutées dans leur groupe respectif. Toutefois, malgré la valeur ajoutée enregistrée élevée dans leur groupe, certaines exploitations (2) n’atteignentpas la valeur ajoutée estimée. Elles s’en approchent car elles sontlimitées par la conduite traditionnelle adoptée par le producteur.
La répartition des exploitations oléicoles a mis en valeur que les différentes valeurs ajoutées s’approchent de l’équilibre à long terme à des degrés différents. D’après la figure 3, l’exploitation 5dont le producteur fait partie du groupe d’extension avec adoption de la technologie. Il se caractérise par l’utilisation de la fertilisation comme technique moderne, enregistrant la plus petite valeur ajoutée de son groupe s’ajoutant à la plus petite superficie. Quant à l’exploitation 9, son producteur fait partie du groupe d’adoption de la technologie. Il se caractérise par la pratique de l’irrigation et la fertilisation, enregistrant la valeur ajoutée la plus élevée de l’échantillon s’ajoutant à la plus grande superficie. Alors que le producteur 10, son exploitation enregistre une valeur ajoutée et une production en valeur moindre que le producteur 9. Toutefois, ces deux producteurs appartiennent au même groupe et ayant les mêmes facteurs de production. Ainsi, le producteur 10 doit essayer d’améliorer la valeur ajoutée enregistréede son exploitation en tendant vers l’équilibre marqué par la valeur ajoutée estimée. De plus, la répartition des exploitations oléicoles a mis en valeur que les deux catégories renferment des producteurs modernisateurs et des producteurs traditionnels. En effet, malgré l’adoption de la technologie (fertilisation ou irrigation) par le producteur, certaines exploitationsdégagent une valeur ajoutée inférieure à la valeur ajoutée estimée. Elles se caractérisent par des superficies les plus petites de leur groupe (11, 12) et des productionsfaiblesen valeur par rapport aux autres ayantdes superficies voisines (7, 10). Et ce, à cause des contraintesque rencontrent les producteurs tels que des problèmes de pénurie d’eau, un manque de financement pour l’irrigué, la rareté et la cherté de la main d’œuvre, problème d’infrastructure et manque de vulgarisationlimitant leur modernisation.La répartition a, aussi, mis en évidence que des producteurs adoptants l’extension avec conduite traditionnelle, leurexploitation arrive à dégager une valeur ajoutée rémunératrice des facteurs de production supérieure à la valeur ajoutée estimée. Certaines se distinguentpar lasuperficie qui est la plus élevée du groupe (16) etpar leur production en valeur qui est la plus élevée par rapport aux autres ayant des superficies voisines (13). D’autres producteurs (15) se caractérisent par l’acquisition de leurs propres matériels et bénéficiant d’un effectif de MOf des plus élevés de l’échantillon. Ainsi, le fonctionnement de l’exploitation oléicole a fait que la valeur ajoutée enregistrée soit supérieure ou égale à la valeur ajoutée estimée, malgré l’étroitesse de la superficie. En effet, dupoint de vue socioéconomique, le revenu des producteurs de cette stratégie se caractérise par un revenu agricole diversifié entre élevage et olivier. La force de travail familial est bien présente de manière importante ce qui peut réduire le coût et alléger le problème financier avec d’autres revenus qui participent à l’exploitation et au besoin de la famille. Ainsi, la répartition des producteurs (exploitations)suivant des stratégies différentes dans leur contexte politico-institutionnel, a apporté un éclairage supplémentaire à l’analyse de la politique publique visant l’amélioration de la productivité.
Conclusion
L’objectif de notre travail est de répondre à la question : Dans quelle mesure la configuration institutionnelle permettrait-elle de réaliser des gains de productivité dans le cadre de la politique publique ? Pour ce faire, nous avons adopté une méthodologie renfermant une analyse qualitative de la politique publique moyennant le séquençage croisé aux « Trois I » et compléter par une analyse quantitative moyennant un modèle économique permettant l’estimation de la valeur ajoutée.
Ainsi, l’interaction entre les idées, les intérêts et les institutions et leur évolution au fil du séquençage, comme il a été démontré par l’analyse de la politique publique, contraignent l’amélioration de la productivité au niveau du secteur oléicole. Tout au long des trois séquences, les idées des décideurs publics justifiées par leurs intérêts semblent avoir un poids explicatif important. Au niveau de la mise en œuvre, il existeune mosaïque d’interactions entre les intérêts, les idées des producteurs et les institutions. Cette situation traduit la présence d’un abîme assez important qui s’est installé entre la politique publique et lesproducteurs à cause de leur absence dans les débats et les prises de décisions qui n’engagent pas un nombre important des catégories existantes d’acteurs. Par conséquent, l’absence sur le terrain des instruments qui suscitent l’intérêt de la majorité des producteurs a favorisé l’existence des formes d’organisations informelles. Ceci étant à l’origine de la faible influence des instruments sur le comportement du producteur au profit des institutions informelles qui guident fortement les stratégies.
En outre, le modèle a mis en évidence quela superficie a pu générer de la valeur ajoutée dans notre cas d’étude du secteur oléicole, parmi les facteurs primaires de production considérés. En effet, les deux catégories de la répartition des exploitations oléicoles renferment des producteurs modernisateurs et d’autres traditionnels. Cette répartition obtenue est due à l’importance de la taille de l’exploitation, la production réalisée, la situation socioéconomique du producteur et les problèmes rencontrés à l’échelle de l’exploitation. Au final, l’analyse qualitative complétée par l’analyse quantitative ont mis en évidence les difficultés et la complexité de la situation du secteur oléicole pour l’amélioration de la productivité entrainant le résultat de sa faible croissance.
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